Sondages

Science exacte

d'Lëtzebuerger Land du 17.06.2004

L’ampleur de la victoire des chrétiens sociaux faisait peu de doute deux mois avant le scrutin du 13 juin. La défaite des libéraux était elle aussi prévisible sans que le parti ne fasse d’ailleurs quoi que ce soit pour ramer à contre courrant d’un électorat déçu par les cinq années de pouvoir partagé avec le CSV et animé de la volonté de changement. En mai RTL Radio et l’institut Ilres publient un sondage dans lequel 82 pour cent des personnes interrogées placent le Premier ministre sortant Jean-Claude Juncker comme le prochain chef du gouvernement. Jean Asselborn, le leader de l’opposition socialiste ne faisait un premier ministrable que pour huit pour cent de sondés. La ministre des Affaires étrangères sortante Lydie Polfer faisait moitié moins, à quatre pour cent, perdant encore un point d’opinions favorables autour de son nom par rapport au sondage précédent, un mois plus tôt. Quant à Juncker, plus l’échéance des législatives avançait, plus l’opinion lui était acquise : 77 pour des personnes interrogées par RTL/Ilres penchaient en sa faveur en mars et cinq pour cent de plus en mai. Dans la même enquête, les Luxembourgeois jugeaient probable à 60 pour cent un changement de gouvernement et plus de 75 pour cent s’attendaient à une grande coalition entre le CSV et le LSAP. Les anticipations des électeurs sur le raz de marée conservateur du 13 juin dernier se sont également avérées justes. Ils étaient 87 pour cent selon RTL/Ilres à prévoir que les chrétiens sociaux gagneraient des sièges au parlement. Les Verts étaient donnés gagnants à 91 pour cent. On subodorait aussi un LSAP un peu revigoré par le scrutin après cinq ans de purgatoire dans l’opposition. En revanche, tous s’attendaient au revers subi dimanche par le DP : 39 pour cent seulement des sondés donnaient le parti renforcé après le 13 juin. Par contre, le recul de l’ADR qui s’est produit dimanche n’a pas été anticipé par l’enquête. 62 pour cent des personnes interrogées par Ilres pronostiquaient les législatives favorables aux populistes. Rien de tel ne s’est produit puisqu’ils ont perdu dimanche deux de leurs sept députés sortants. Plus fins, les sondages confectionnés par l’Ilres pour le compte du Tageblatt ont donné dès le mois d’avril, à peu de choses près, le tiercé gagnant dans l’ordre du suffrage de dimanche dernier. Le parti chrétien social était alors crédité de 23 sièges dont 22 « sûrs ». Les conservateurs ont envoyé dimanche 24 des leurs au Krautmart. Les paris donnaient le Parti ouvrier socialiste à 15 sièges au parlement – il en a obtenu 14 – dont 13 avec une quasi certitude horlogère. Le sondage d’avril avait aussi prévu la débâcle libérale : le DP était crédité il y a deux mois de dix sièges à la Chambre – contre 15 à l’issue du scrutin de juin 1999 – ce qui s’est avéré juste. La victoire des écologistes avait en revanche été un peu exagérée : huit sièges (sept sûrs) étaient attribués aux Verts qui ont pu en obtenir sept au total. Le pari fou de Gast Gyberien d’envoyer un groupe de neuf représentants de l’ADR à la Chambre n’a fait rêver que le président et les militants de ce parti qui est sorti des urnes amputé de deux des siens avec une fraction désormais réduite à cinq personnes, là où l’Ilres en voyait entre six et sept. Le partage des voix dans les quatre circonscriptions du pays s’est révélé lui aussi exact, à peu de détails près : neuf députés CSV dans le sud qui passait largement à droite, alors qu’en 1999 l’équilibre entre les conservateurs et les socialistes était encore respecté ; huit pour l’ancien partenaire de coalition ; deux pour le DP (qui en a tout de même gardé quatre), les Verts et l’ADR et peanuts pour La Gauche. Dans la circonscription du centre, les sondages avaient visé presque juste : huit représentants CSV ; quatre sûrs ou cinq DP, quatre LSAP, trois Verts et deux ADR qui ont perdu un élu. Dans le nord, les anticipations de l’Ilres ont été un peu trop optimistes pour les socialistes et l’ADR crédités d’un voir même deux sièges chacun. Le syndrome vert dans cette circonscription avait été prévu d’avance. Le baromètre politique publié le 12 mai par le même Tageblatt a tout de même fait l’impasse totale sur l’une des étoiles montantes des Verts, Viviane Loschetter. 43 pour cent des sondés disaient ne pas connaître cette conseillère communale et 28 pour cent des personnes ne pariaient pas sur son influence politique sur la scène nationale. L’intéressée partage sûrement des vues différentes.

Véronique Poujol
© 2023 d’Lëtzebuerger Land