Les communes sous tutelle

Tutelle

d'Lëtzebuerger Land vom 27.01.2000

Quelle était la véritable intention du Premier ministre Jean-Claude Juncker, lorsqu'il proposa, vendredi dernier, à ceux des élus locaux eschois qui revendiquent de nouvelles élections, de démissionner de leur mandat pour provoquer une réédition du scrutin communal ? Méconnaissance de la législation communale, simple boutade ou intention machiavélique, peu importe finalement ; les propos du chef du gouvernement volant au secours de son ministre de l'Intérieur ont mis en exergue la tutelle que  ce dernier exerce sur les conseils  communaux. Une chose est sûre, là n'était certainement pas l'intention de Juncker. L'interprétation restrictive de la législation régissant les communes fait du ministre de l'Intérieur l'unique entité qui, en fin de compte, puisse proposer au Grand-Duc la dissolution du conseil communal et l'organisation de nouvelles élections. La solution "offerte" par le Premier ministre n'entraînera que des élections partielles, à l'avantage des non-démissionnaires. Quant à la possibilité d'un vote de méfiance ou du refus du budget de la part du conseil, cette hypothèse concerne uniquement le conseil échevinal, qui sera dissout, et non pas le conseil communal. Le vote d'une motion ou d'une résolution pour revendiquer une auto-dissolution est certes un signe politique très fort, mais n'engage pas le ministre de l'Intérieur pour autant. Ce dernier reste, dans tous les cas de figure, maître de la situation. L'opiniâtreté du ministre de l'Intérieur Michel Wolter d'éviter coûte que coûte le retour aux urnes à Esch-sur-Alzette aura donc amené un enseignement majeur, celui que la législation communale a besoin d'être réformée pour octroyer davantage d'autonomie et d'autodétermination aux entités communales démocratiquement élues. Si aucun parti politique, hormis l'ADR, ne veut coaliser avec le PCS à Esch, et qu'une autre constellation échevinale se révèle impossible, quel autre moyen que le verdict des urnes reste-t-il ? Bien qu'il soit compréhensible que le ministre PCS de l'Intérieur veuille gagner du temps, question de donner au PCS la chance de redorer son blason avant de proclamer de nouvelles élections, inévitables, Wolter ferait bien de ne pas oublier qu'une motion respectivement une résolution reflète toujours une décision prise par une majorité.

marc gerges
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