Circonscription Nord

Socialisme rural

d'Lëtzebuerger Land vom 14.10.1999

Les félicitations du jury vont unanimement aux électeurs de Wiltz. Catapulter un parti d'opposition à la majorité absolue, voilà un Wielerwëllen qui ne tolère aucune mauvaise interprétation ni déformation. Les autres villes du Nord toutefois sont loin de pouvoir revendiquer la même décoration. Pour rares que les raz-de-marée soient au Luxembourg, Wiltz en a bien connu un. Les socialistes (45,7 pour cent) gagnent près de dix pour cent et deux sièges pour se hisser à six et donc la majorité absolue au conseil communal. Le maire sortant, John Müller (PCS) a subi une défaite cuisante, sa liste (22,4 pour cent) perdant près de cinq pour cent et deux sièges pour se retrouver avec deux fauteuils à la mairie au même niveau que les libéraux (17,25 pour cent) dont le résultat est resté stable. La liste indépendante de Jos Arens a maintenu son siège (10,5 pour cent, plus deux), alors que les Verts n'ont obtenu que 4,1 pour cent pour leur première tentative. En absence de près de la moitié des conseillers communaux sortants, le POSL a donc su saisir sa chance. L'électeur a de même procédé à un changement de génération en donnant un avantage indiscutable à Romain Schneider (1 833 voix) devant l'ancien député-maire et futur premier échevin André Biver (1 341 voix). La volonté de l'électeur est moins facile à déchiffrer à Diekirch. Certes, le vainqueur du scrutin, tout le monde le concède, s'appelle Danièle Wagner (POSL). Avec un plus de six points, son parti (36,6 pour cent) devient la première force politique de la ville de garnison, rate toutefois le cinquième siège. L'autre gagnant de dimanche est Frank Thillen des Verts (11,5 pour cent), qui réussissent dès leur première tentative à entrer au conseil communal. La déconfiture du PCS (29,9 pour cent), six ans après avoir perdu la mairie et le retrait de Marie-Thérèse Boever, continue : moins six pour cent, même si le quatrième siège a pu être sauvé. La clarté du verdict de l'électeur laisse néanmoins à désirer, puisque le partenaire de coalition du POSL, les libéraux (21,9 pour cent), a perdu près de sept points et son troisième siège. Du côté du PCS on déclare certes son intérêt pour remplacer le PDL au collège des bourgmestre et échevins, mais tout indique un renouvellement de la coalition sortante. En position de faiblesse, les libéraux pourraient toutefois être forcés de renoncer à un " splitting " du mandat du deuxième échevin. Les électeurs d'Ettelbruck ont pour leur part refusé de trancher. Le PCS reste aussi en absence de feu Edouard Juncker premier parti, le POSL compte, avec Claude Halsdorf, dans ses rangs l'élu avec le meilleur résultat personnel et la tête de liste des libéraux a plus ou moins su maintenir son résultat. Ce qui laisse trois coalitions possibles. Seuls les Verts (8,38 pour cent), qui maintiennent leur siège - même si Marthy Thull remplace Cary Michels - sont exclus du jeu. L'ADR (5,3 pour cent), présentant pour la première fois une liste, s'est vu refuser son ticket d'entrée au conseil communal. Ettelbruck est donc sorti des élections avec deux prétendants au trône : le maire sortant Pierre Kraus (PCS) - dont le score personnel s'est légèrement amélioré sans faire oublier son prédécesseur - et la tête de liste socialiste Claude Halsdorf, qui a obtenu 132 voix personnels de plus que son rival. Le premier revendique son droit d'initiative en tant que premier parti (34,8 pour cent, cinq sièges), le second s'estime incontournable en tant que vainqueur des élections (29,6 pour cent, quatre sièges). Le POSL a gagné deux pour cent, pour une perte de trois points chez le PCS et le PDL respectivement. Ce dernier s'est en fin de compte montré trop gourmand, le PCS venant à la conclusion qu'une coalition avec le POSL peut se faire sous de meilleures conditions pour une majorité plus stable. Pierre Kraus restera bourgmestre, Claude Halsdorf sera premier échevin. Le troisième poste sera partagé. Les descriptions de " l'Oesling rural et conservateur " devront donc être revues. Ce sont les socialistes qui sont le premier parti dans les trois villes du Nord avec, en moyenne, quelque 37 pour cent. Aux législatives, le POSL n'avait obtenu que de piètre 16,5 pour cent dans la circonscription du Nord. Même s'il est vrai que dans les communes votant selon le système proportionnel, ce chiffre était déjà plus élevé (25 pour cent). Le PCS pour sa part se cherche. Les chrétiens-sociaux perdent dans les trois villes du Nord et se retrouvent devant le défi de se renouveler. L'œuvre pourrait se révéler de longue haleine comme l'a montré la nouvelle déception à Diekirch. Les libéraux, s'ils ne se trouvent qu'au troisième rang, bénéficiaient jusqu'ici de l'agréable situation de faiseur de roi. Avec l'entrée des petits partis dans les conseils communaux cette position est cependant devenue de moins en moins enviable, puisque les grandes coalitions, d'antan jugées écrasantes, sont considérées aujourd'hui plus que confortables. Les résultats de Diekirch, Ettelbruck et Wiltz ne trahissent cependant qu'une petite partie de la réalité politique de l'Oesling. Les trois villes ne représentent en fait que quelque 22 pour cent de l'électorat. Le Nord reste largement une région où domine le scrutin majoritaire à deux tours. Un système qui, en 1999, s'est révélé docile pour les bourgmestres sortants. Ils ne sont que deux à avoir raté leur réélection dès le premier dimanche : Marc Schmit à Rédange - aucun candidat de la section n'a échappé au ballottage - et Jean-Paul Bormann à Grosbous. Le premier se trouve toutefois en position favorable, alors que le second n'arrive qu'en cinquième position. Les vedettes nordistes de la politique nationale n'ont pas non plus à trop se plaindre de leurs électeurs. Ce serait plutôt l'inverse : avec Messieurs Colombera, Weiler et Wohlfart, trois des neufs députés du Nord n'ont pas été candidats au niveau local. Pour la plupart des autres membres de la Chambre, le dimanche était plutôt paisible. Aussi bien Emile Calmes (PDL, 84 pour cent) à Bettborn que Agny Durdu (PDL, 67 pour cent) à Wintger, Camille Gira (Déi Greng, 64 pour cent) à Beckerich et Marco Schank (PCS, 80 pour cent) à Heiderscheid ont été réélus à la première place et devraient retrouver leurs fauteuils de bourgmestre. Le résultat était moins glorieux pour Nico Loes (PCS) dans la Commune du Lac de la Haute Sûre réélu qu'au deuxième rang avec 58 pour cent. Seul Jean-Pierre Koepp (ADR) à Consthum a dû être encore plus déçu. Il a été (de justesse) relégué au ballottage dans sa commune. Il pourrait même se retirer de la politique locale avant le deuxième tour. L'ADR est d'ailleurs le grand perdant des élections communales dans le Nord. Ce qui était déjà connu d'avance. Alors que le parti avait réalisé un résultat impressionnant aux législatives il y a quatre mois (16,7 pour cent), il n'a présenté qu'une seule liste aux communales. La distance et les sujets nationaux semblent mieux réussir aux tribuns de l'ADR que la proximité et les problèmes locaux. Déi Gréng par contre semblent pouvoir s'enraciner au Nord. Outre la coqueluche des électeurs Camille Gira, le parti peut compter les bourgmestres sortants de Rédange, Marc Schmit (toutefois mis en ballottage), et de Neunhausen, Pierre Bormann (réélu en première place) dans leurs rangs. Dans les villes du Nord, Déi Gréng sont présents dans deux de trois conseils communaux. Le succès du verdâtre Marco Schank est un autre signe pour le succès que peuvent avoir les écologistes dans les régions rurales. À condition toutefois de rester terre à terre.

Jean-Lou Siweck
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