Pascale Seil

Le soleil dans la maison

d'Lëtzebuerger Land du 22.07.2011

Elle est la seule au Luxembourg à exercer ce métier devenu presqu’exotique. Dans son atelier de soufflage de verre à Berdorf, Pascale Seil crée des objets qui, aujourd’hui, sont largement tombés sous la coupe des industriels. À 42 ans, elle s’estime heureuse de, finalement, pouvoir vivre de sa passion. Si « le début n’était pas facile », elle a dû se battre pour gagner sa place. Pendant ses études de céramique puis de verre à l’École des arts décoratifs de Strasbourg, elle fait connaissance du métier du soufflage de verre. Tout de suite, elle tombe amoureuse de ce métier qui est « plus qu’un art, qui est un artisanat ». Voulant approfondir cette rencontre, elle complète son parcours par une formation de verrier à la main au Cerfav, Centre européen de recherches et de formation aux arts verriers, à Vannes-le- Châtel, près de Nancy.

Indépendante depuis 1995, Pascale Seil crée d’abord des objets utilitaires : des vases, des verres, des coupes. Les arts de la table mais également les sculptures composaient l’essentiel de ses collections. Souvent ludiques, les sculptures s’inspirent souvent des phénomènes naturels que la jeune artiste observe en se promenant. Ce sont en particulier les forêts autour de Berdorf et la légende des figures dans les rochers qui ont influencé les « sculptures têtes » exposées actuellement dans l’atelier. Les objets sont sans chichis, plutôt minimalistes. Comme les Péckvillercher, très élégantes surtout dans leurs couleurs mates.

Depuis peu, sa gamme de produits s’est élargie. Aujourd’hui, ce sont les lampes qui sont une des attractions majeures de ses expositions. « Nous avons inventé un nouveau système, avance-t-elle, pour lequel nous essayions actuellement d’avoir un brevet ». En 2006, avec Henri Dostert, ils ont créé une société, Solstice, qui fait des luminaires sur mesure : « Lui, il s’occupe de l’inox et de l’électricité, moi, je fais le design et la réalisation des verres ». Le duo se réjouit de la sélection en 2010 pour le prix d’innovation dans l’artisanat de la Chambre des métiers. La fonctionnalité compte pour beaucoup : Puisqu’une « lampe qui est sale n’est pas belle », explique Pascale Seil, ici « l’on peut l’enlever facilement et la mettre dans la vaisselle ». Chez Pascale Seil, les verres sont précieux. C’est clair, ils sont tous soufflés à la main. Ils sont tous individuels. Pour la conception des luminaires, « nous nous adaptons à l’intérieur de la maison du client. Le résultat dépend de la chambre, de la hauteur du plafond, du circuit de l’électricité », explique l’artiste. Il s’agit de s’ajuster aux besoins du client, c’est ainsi qu’apprend l’artiste et qu’évolue sa [-]création.

Sources d’inspiration sont également les nombreuses foires. Comme Ambiance [&] Jardins au Château d’Erpeldange ou encore la Bundesgartenschau à Koblenz. Ces expositions et celles qu’elle organise dans son atelier, ensemble avec d’autres artistes, comme la bijoutière Annick Mersch, « contribuent à la construction de réseaux et de relations » nécessaires au travail d’un artiste. Car, « la mentalité de paysan » des Luxembourgeois (« ce qu’on ne connaît pas, on ne le mange pas ») ne facilite pas toujours les choses. De nombreuses réticences face à un travail artisanal qui n’est pas ou plus dans nos habitudes ont dû être surmontées. Aujourd’hui, Pascale Seil a une certaine renommée. En effet, ses objets sont commandés non seulement par des clients individuels mais également par des ministères, des banques et la Chambres des députés.

Ce qu’elle adore dans son travail, c’est qu’« on peut énormément varier ». Et qu’avec le four, qui chauffe à 1 120 degrés celcius, on a « toujours le soleil dans la maison ». Si « dans toute forme, il y a une forme de base », la matière, malléable, permet de constamment expérimenter. Tout est ouvert : « Le défi est dans l’évolution ». C’est le processus qu’elle aime, la découverte qu’il faut essayer de maîtriser. Et puis, « parce qu’on a toujours tout de suite un résultat ».

Aux constantes viennent s’ajouter des idées nouvelles. Si l’on retrouve souvent points et lignes, les couleurs peuvent varier selon les saisons. Les combinaisons orange-brun, noir-blanc ainsi que le bleu sont des couleurs que l’on retrouve. Les couleurs sont plutôt douces, les formes aussi. Elles donnent envie de toucher. La passion de Pascale Seil est entrée dans ses objets.

Nathalie Oberweis
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