Différences salariales

Qui gagne le moins ?

d'Lëtzebuerger Land vom 07.05.2009

Après les formulaires E301, spécialement destinés aux demandeurs d’emploi non-résidents, dont la Banque centrale du Luxembourg (BCL) avait révélé en mars dernier l’inquiétante inflation auprès de l’Administration de l’emploi (d’Land, 03/04/09), voici une autre étude qui tend à démontrer le sort différend des salariés selon qu’ils sont d’un côté ou de l’autre de la frontière. La BCL avait signalé en mars dernier que la crise ne frappait pas de la même manière les frontaliers et les résidants, les premiers en étant les principales victimes sur le front social.

Le Statec s’est occupé lui de pister les différences salariales en fonction du genre, de la résidence, du secteur d’activité et de la taille de l’entreprise, dans une étude publiée cette semaine qui relève un salaire médian qui pointe à 2 633 euros brut équivalent temps plein (ce qui veut dire que la moitié des salariés ont sur leur fiche de paie un montant inférieur ou égal à ce chiffre). Un pour cent des salariés de l’échantillon montraient une fiche de paie à 10 763 euros ; 11 767 pour les hommes et 7 998 pour les femmes, la différence est énorme, l’écart se creusant essentiellement, selon le Statec dans la fourchette haute des salaires. Mais attention aux conclusions hâtives, prévient l’institut qui explique qu’une partie de l’écart, voire son entièreté trouverait sa justification dans la différence de profils (niveau d’étude, secteur d’activité) entre les hommes et les femmes. Ce volet devrait d’ailleurs être traité ultérieurement, le Statec mentionnant toutefois l’existence d’un gap plus élevé chez les femmes que chez les hommes entre les hauts et les bas salaires, ce qui lui fait dire que la distribution des salaires serait plus inégale dans les rangs des salariées.

Le salaire moyen (à ne pas confondre avec le salaire médian) s’élevait en 2006 à 3 243 euros, 3 024 pour les femmes et 3 359 pour les hommes. Tout dépend bien sûr de l’âge de la bête : en principe, plus un salarié vieillit, mieux il est payé. Quelqu’un de 55 ans ou plus percevait en moyenne  4 676 euros de salaire médian brut annualisé – c’est-à-dire avec les primes, gratifications et 13e ou 14e mois – (6 249 euros de salaire moyen) contre 2 454 euros pour une personne de moins de 25 ans (2 519 en salaire moyen). Le niveau d’éducation joue évidemment son rôle. Cependant, l’enseignement supérieur serait moins valorisant, les chiffres du Statec montrant que le salaire médian des universitaires (3 302 euros) dépassant de « seulement » 24 pour cent celui des simples bacheliers (3 302). Le lieu de résidence a une influence importante sur le niveau du salaire : un salaire mensuel médian d’un frontalier qui vient de France étant de 2 356 euros alors qu’il est de 2 802 pour un résidant, 2 780 euros pour un frontalier belge et 2 654 euros pour un navetteur allemand. « Les résidants, note le Statec, affichent ainsi un écart d’un pour cent par rapport aux frontaliers venant de Belgique, de six pour cent avec ceux d’Allemagne et de près de vingt pour cent avec les salariés traversant la frontière française ». Précisions de l’étude : les salariés qui habitent derrière la douane de Sterpenich sont à 38 pour cent des universitaires qui occupent le plus souvent des postes de directeurs ou de cadres supérieurs.

L’étude se penche encore sur les salaires selon les professions : un directeur touche en fin de mois un salaire médian brut de 6 699 euros (7 389 en salaire brut moyen) tandis qu’un ouvrier gagne 1 802 euros, un employé administratif 2 772 euros et un vendeur 1 960 euros. 

Le Statec mentionne enfin les différences de rémunération entre les salariés couverts par une convention collective et ceux qui n’ont pas cette chance : cette « couverture » augmente le salaire médian des ouvriers de quinze pour cent et celle des employés de six pour cent. Pour les employés, l’effet positif des conventions se limite au secteur social, à l’industrie manufacturière, les activités juridiques, comptables et informatiques et la construction. Dans le secteur financier, il vaut mieux échapper à la convention collective où le salaire médian brut s’élève à 5 374 euros qu’y être soumis (3 368 euros). Le plus aussi pour les salariés du privé, c’est de faire partie d’un groupe : cette appartenance rapporte un salaire médian mensuel de 3 047 euros contre 2 415 pour ceux qui travaillent pour un employeur indépendant.

Véronique Poujol
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