Tableaux d’une exposition (en montage)

« Je veux offrir un peu de calme aux gens »

Le curateur du Mudam, Christophe Gallois, et l’artiste Jean-Marie Biwer, lors de l’accrochage
Photo: Anthony Dehez4
d'Lëtzebuerger Land du 06.03.2020

L’invitation lui est parvenue par lettre manuscrite. « Ceux qui me connaissent savent que je ne réponds guère au téléphone mobile, surtout quand je suis dans le Sud de la France en été », raconte Jean-Marie Biwer. Ceux qui le connaissent savent qu’il habite presque en ermite à Basbellain, dans l’Œsling, où il a un grand atelier lumineux et fait de longues promenades dans la nature, dont les impressions vont alimenter ses tableaux. « Depuis dix ans, je me suis presque entièrement retiré », dit-il. Un problème de santé, « et puis à mon âge (il est né en 1957 à Dudelange), je n’ai plus rien à prouver ».

Suzanne Cotter, la directrice du Mudam, avait vu un tableau de Biwer et était si enthousiaste qu’elle l’invita donc à réaliser une grande exposition monographique au musée. Là où Marie-Claude Beaud, la première directrice du Mudam, lui avait commandé un tableau pour l’ouverture, c’était Atelier (2004-2005), une grand huile sur toile d’un mètre 80 sur deux représentant son propre atelier, ainsi que seize dessins préparatifs, qui ont tous intégré la collection du musée. Et là où Enrico Lunghi, le deuxième directeur, avait exposé ses Faïences de Moustiers (2015). « Mais cette exposition-ci a quand-même une toute autre envergure ! » affirme l’artiste.

D’après nature commence dès l’entrée du musée, où est accrochée une mosaïque de Carlo Signorini d’après une toile de Jean-Marie Biwer, que Signorini avait entamée en été 2019, mais n’avait pas eu le temps de terminer avant son décès abrupt en septembre. « C’est une merveille absolue », s’enthousiasme Biwer. Les assistants de Signorini à Ravenna ont terminé la mosaïque. Au café est installé Dudelange (2007), seize peintures réalisées pour la ville de son enfance, avant qu’on n’entre dans la galerie Est du rez-de-chaussée, où Biwer a organisé une dialectique entre grands et petits formats, entre œuvres indépendantes et commandes, grandes natures et petites esquisses réalisées dans ses Wooden sketchbooks (qui sont désormais au nombre de 258 – un dernier est venu s’ajouter le week-end passé).

« Quand nous sommes revenus au Luxembourg dans les années 1980, les collègues de ma génération et moi, il n’y avait absolument rien ici. Il nous fallait inventer notre chemin », se souvient l’artiste. C’est pourquoi il a fait le choix d’exposer aussi ses tableaux de commande, de Dudelange, de Troisvierges, pour des maîtres d’œuvre privés ou pour illustrer le Tao Te King de Lao Tseu en luxembourgeois par Serge Tonnar : il veut montrer que c’est une possibilité parmi d’autres pour gagner sa vie en tant que peintre.

D’après nature dresse le parcours d’une vie d’artiste, quarante ans de création – sans pour autant surcharger l’accrochage. « Christophe Gallois est un excellent curateur, très rigoureux, on a très bien travaillé ensemble », raconte Jean-Marie Biwer. Et d’ajouter que son ambition était surtout « d’offrir un moment de calme aux gens, dans un monde de plus en plus chaotique ».

L’exposition D’après nature de Jean-Marie Biwer sera inaugurée ce soir, vendredi 6 mars, avec la présentation du catalogue (à 17 heures) et une reception à partir de 18 heures ; jusqu’au
24 mai ; mudam.lu.

josée hansen
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