Nouveau parlement européen

Parlement d’opposition

d'Lëtzebuerger Land vom 17.06.2004

Qui a dit qu’il n’y avait pas d’esprit européen ? Les élections pour le parlement de Strasbourg confirment pourtant des tendances lourdes communes à (presque) toute l’Europe : participation électorale en baisse, absence de sujets propres au Parlement européen dans les campagnes électorales et sanction des partis au pouvoir au niveau national. Les fêtes du 1er mai dernier semblent bien loin. Malgré l’apathie générale qui a accompagné ces sixième élections directes au Parlement européen depuis 1979, le scrutin est marqué par une remarquable stabilité de la composition de l’assemblée. Brièvement passée à 786 députés après l’élargissement, l’hémicycle de Strasbourg comprend maintenant 732 députés. Le taux de participation a baissé encore, passant de 49,8 pour cent en 1999 à 45,5 pour cent. La première force restera avec 276 sièges ou 37,7 pour cent (plus 0,3 p.c.) le groupe PPE-DE, qui rassemble chrétiens-démocrates et conservateurs. Le PSE, les socialistes européens, reste en deuxième place avec 200 sièges ou 27,3 pour cent (moins 2,2 p.c.). L’ELDR, les libéraux, se maintient au troisième rang avec 67 sièges ou 9,1 pour cent (plus 0,6 p.c.). Malgré le maintien des trois piliers traditionnels de l’assemblée, le scrutin est marqué par une forte croissance des voix eurosceptiques. C’est vrai pour les délégations britannique (vingt pour cent pour le United Kingdom Independence Party) et suédoise mais aussi pour celles de bon nombre de nouveaux États membres. Le positionnement dans le Parlement de ces différents partis, qui vont du populisme jusqu’à l’extrême droite, doit encore se confirmer. L’apparente stabilité au Parlement européen pourrait se révéler trompeuse. La coopération entre chrétiens-démocrates et conservateurs britanniques agace par exemple certaines composantes du Parti populaire européen. L’UDF française compte parmi ceux qui pourraient constituer un nouveau groupe politique centriste et résolument pro-européen, affaiblissant le PPE-DE. Le fonctionnement du Parlement européen n’exige, à la différence de la Chambre, pas de majorité stable. Les coalitions se font et se défont en fait au rythme des directives voire des amendements à adopter. La plupart du temps, ce sont les libéraux et les verts (42 sièges ou 5,7 p.c.) qui permettent de faire la différence en s’alliant à l’un ou l’autre des deux grands blocs. En début de législature par contre, on négocie en principe une réelle coalition en vue de se répartir les postes, à l’exemple de la présidence du Parlement et de celle des puissantes commissions. Traditionnellement, ce sont le PPE-DE et le PSE qui se partagent le gâteau. La dernière législature a rompu avec ce procédé, les chrétiens-démocrates s’alliant aux libéraux. Au perchoir de l’assemblée, c’est ainsi Pat Cox du ELDR qui avait succédé à Nicole Fontaine du PPE après la moitié de la législature. Le Parlement européen est finalement un législateur comme une autre : on y fait beaucoup de travail de détail, parfois de la grande politique et souvent on s’adonne à des jeux purement politiciens.

Jean-Lou Siweck
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