Ticker du 3 mars 20236

d'Lëtzebuerger Land vom 03.03.2023

« Une consolidation progressive »

Le ministère des Classes moyennes a présenté ce jeudi son premier « Retail Report ». Basé sur le cadastre du commerce, établi entre 2019 et septembre 2022 par « une entreprise renommée de recherche en commerce » (tellement renommée qu’elle n’est pas nommée). On peut y apercevoir les effets de la crise sanitaire. Ainsi, les magasins de bricolage ont connu une envolée de 22 pour cent, la population étant confinée chez elle. (Les parfumeries ont au contraire accusé un recul de moins six pour cent.) Cela paraît incroyable, mais les centres commerciaux continuent de croître, avec une augmentation de dix pour cent des surfaces de vente, et ceci trois ans après l’ouverture de la Cloche d’or. Au même moment, les centres-villes constatent une baisse du nombre de commerces (-2,7%), ou, pour reprendre la terminologie officielle (et vaguement lénifiante) : « Une consolidation progressive ». On apprend dans le rapport que les centres villes connaissent actuellement un taux de vacance de 13,5 pour cent (donc presque un magasin sur sept). bt

Space business

Les affaires tournent, mais pas assez pour les Bourses. L’opérateur de satellite SES a annoncé lundi une augmentation de neuf pour cent de son chiffre d’affaires en 2022 par rapport à 2021, à presque deux milliards d’euros. Mais les prévisions 2023, autour du même montant et en-dessous des anticipations de l’entreprise, déçoivent les investisseurs. Les marchés ont sanctionné le titre avec une chute de huit pour cent lundi et dix pour cent sur la semaine. pso

Star war

Les États-Unis et le Luxembourg s’engagent dans l’échange de données via l’espace grâce aux satellites de pointe opérés par SES. Le ministre de la Défense, François Bausch (Déi Gréng), a annoncé jeudi dernier investir pas loin de 200 millions d’euros sur les dix prochaines années pour exploiter les capacités de communication satellite de la constellation O3b mPower que l’opérateur de Betzdorf est en train d’envoyer dans l’espace. Deux satellites ont été mis en orbite en décembre dernier. Quatre autres le seront au cours du premier semestre de cette année. Au total, onze satellites « d’une technologie de pointe unique », selon les termes du ministère, permettront la mise en place d’un réseau souverain et sécurisé. « La capacité de communication acquise par la direction de la Défense auprès de SES, sera garantie et pourra être partagée avec d’autres clients ou partenaires approuvés par la Défense », précisent les services du ministre vert kaki.

Le gouvernement s’engage résolument dans sa stratégie spatiale définie l’an passé (avec un volet observation de la Terre, un volet connaissance de l’espace et, donc, un autre volet communication) en marge de la guerre en Ukraine, dans le cadre de son appartenance à l’Otan, conformément à l’objectif d’un effort de défense équivalent à un pour cent du PIB pour 2028 et en tenant compte du fait que l’espace est devenu « un enjeu de sécurité nationale ». De sécurité internationale aussi puisque le ministère agit avec pour ligne directrice de coopérer avec « les pays partageant les mêmes valeurs ».

Le partenariat noué avec les États-Unis (qui dépenseront la même somme auprès de SES), nommé Medium Earth Orbit Global Services (ou MGS) vise l’exploitation de la constellation O3b mPower pour répondre à des besoins de défense des États avec « flexibilité, couverture globale, faible latence ». Le recours aux nouveaux satellites sera opéré en complément des services offerts par GovSat 1, mis en orbite en 2018, et géré par la société LuxGovSat. La joint Venture du gouvernement et de SES cumule les pertes pour ces premières années d’exercice, mais Ferdinand Kayser (conseiller stratégique du CEO Steve Collar) assure que le revenu commercial s’étoffe après un démarrage des activités « plus lent que prévu », avec notamment la signature de nouveaux contrats avec des pays européens. La guerre servirait les affaires ? Cinquante pour cent des revenus « Networks » (données) du groupe proviennent de l’activité gouvernementale, contre un quart via les opérateurs téléphoniques et un autre quart pour la « mobilité » (avionneurs et croisiéristes).

Ces canaux sécurisés de communication de données pour des segments hautement stratégiques (liés aux intérêts vitaux des nations) préserveraient d’aléas comme la coupure des réseaux par des rogue states, la cyberguerre ou les offensives (interférences) spatiales. « Outre la multitude de leçons tirées au niveau tactique et stratégique, ainsi que dans les domaines terrestre, aérien ou logistique, de la guerre d’agression que mène la Russie contre l’Ukraine, le rôle important de la communication par satellite dans un conflit moderne est devenu évident. Des canaux de communication efficaces et sécurisés assurent le commandement et le contrôle des forces sur le terrain et leur permettent de remplir leurs missions avec succès », a commenté François Bausch. Un projet de loi validera l’investissement dans MGS. pso

François + Ariane =

François Pauly, 58 ans, serait en instance de départ chez Edmond de Rothschild, selon Reporter.lu ce jeudi. Le Luxembourgeois, l’un des rares nationaux à avoir accédé à la tête d’un groupe financier d’envergure internationale, prendrait la direction de la sortie moins de deux ans après avoir été nommé à la tête du comité de direction du prestigieux établissement basé en Suisse. La cause ? Des « vues divergentes sur le modèle d’affaires » avec la Baronne Arianne qui avait pourtant adoubé François Pauly après le décès de son époux Benjamin de Rothschild. Contacté, François Pauly n’a pas donné suite. pso

Les disparus hantent le Luxembourg

« Le 15 janvier 2023, Ricardo Lagunes - un avocat spécialisé dans les droits de l’Homme - et Antonio Díaz, un leader indigène, ont disparu dans l’État de Colima, au Mexique. Cette disparition s’est produite dans le cadre d’un conflit en cours entre la communauté autochtone de San Miguel de Aquila, Michoacán, Mexique et une société minière basée au Luxembourg, Ternium qui fait partie du groupe argentin-italien Techint. » Dans un communiqué publié la semaine passée, le Haut commissariat des Nations unies relie ainsi le Grand-duché, l’exploitation d’une mine au Mexique et la disparition de deux militants des droits de l’Homme.

Lundi, leurs familles ont informé par voie de communiqué qu’elles n’avaient toujours pas de nouvelles des deux hommes. Elles s’insurgent contre l’attentisme des autorités mexicaines, notamment pour enquêter sur les responsabilités de Ternium, l’entreprise au coeur de l’affaire. « Le cas de Ricardo et Antonio tire la sonnette d’alarme au niveau national et révèle l’impunité qui prévaut dans le pays », écrivent les proches des deux militants dont la voiture a été retrouvée criblée de balles. Contactée par le Land, l’entreprise basée au Luxembourg renvoie au communiqué dans lequel elle affirme mener ses opérations « de la manière la plus éthique et la plus transparente, en conformité avec les principes des Nations unies pour les droits de l’Homme ». Ternium précise aussi coopérer dûment avec les autorités mexicaines.

Voilà ce que lui avaient demandé les ministères de l’Économie et des Affaires étrangères du Luxembourg dans un courrier commun envoyé fin janvier. Le gouvernement doit se montrer exemplaire. Le Luxembourg est membre du Conseil des droits de l’Homme depuis l’an passé et jusqu’en 2024 et (surtout) la polémique intervient alors que les ONG réclament que soit imposée à l’entreprise l’obligation de respecter les droits de l’Homme sur toute sa chaîne de valeur, depuis l’extraction de la manière première jusqu’à la distribution des dividendes, des pays peu vertueux en matière de respect de l’état de droit à des États suffisamment fiables et accueillants pour y domicilier la trésorerie. pso

229 000 000

Les élus locaux et nationaux des régions frontalières viennent de lancer une énième initiative pour réclamer à l’État luxembourgeois une « compensation adéquate et permanente pour les pertes de recettes de l’impôt sur le revenu ». Dans une tribune publiée sur les réseaux sociaux fin février, trois députés (LFI) de l’Assemblée nationale, trois députées (SPD) du Bundestag, ainsi que le maire de Trèves plaident pour « une logique de développement territorial transfrontalier équilibré ». Les élus de gauche demandent aux gouvernements allemand et français « de faire preuve de volonté politique » et d’adapter les conventions fiscales. Sans cela, l’affaiblissement des services publics locaux par manque de marge d’action budgétaire serait « inéluctable ». Les élus proposent plusieurs méthodes de calcul, dont une qui se base sur la Compensation franco-genevoise (3,5 pour cent de la masse salariale brute des frontaliers). Appliquant ces taux, ils arrivent à des montants de cent millions et 192 millions d’euros que le Luxembourg reverserait par an à l’Allemagne respectivement à la France. Ce qui distingue cette offensive en faveur de rétrocessions de celles qui l’ont précédée, c’est que les députés nationaux montent dorénavant au front. En juin 2020, la liste de signataires de « Au-delà des frontières » était encore majoritairement composée par des anciens maires PS et PCF, dont la plupart ont atteint l’âge de la retraite. Bref, des « has been ». Les signataires de l’appel de 2023 sont par contre majoritairement des jeunes élues. La question des compensations fiscales ne disparaitra donc pas de sitôt. bt

1,043%

L’État belge a vendu cette semaine 33 millions de ses actions dans BGL BNP Paribas, faisant passer sa participation de 7,8 à 5,1 pour cent et se voyant dépasser par BlackRock comme principal actionnaire. L’opération devrait rapporter quelque 2,2 milliards d’euros à l’État belge. L’État luxembourgeois détient, quant lui, 1,043 pour cent du capital BNP Paribas, maison-mère de la BGL. Il y était devenu actionnaire au même moment que la Belgique, soit en 2008, au lendemain du naufrage de Fortis. Contrairement au voisin belge, le Luxembourg ne songerait pas à vendre ces participations, fait savoir le ministère des Finances à Paperjam ce mercredi. Celles-ci ont rapporté 95,5 millions sur les deux dernières années. bt

Pierre Sorlut, Bernard Thomas
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