Présidentielles en France

Comme coq en pâte

d'Lëtzebuerger Land du 10.02.2012

Sarkozy nous roule dans la farine et Hollande se fait enfariner. Le second est maintenant blanc comme neige, alors que le premier attend toujours d’être blanchi de ses nombreuses casseroles, dont l’affaire Bettencourt n’est certainement pas la dernière. Le président de droite nous pique le blé, quand le prétendant de gauche n’arrête pas de rappeler que ce sont les mains noires qui font le pain blanc. Quant à la fille Le Pen, elle a beau essayer de montrer patte blanche en trempant ses mains dans la farine, le reflet brun du froment finit toujours par réapparaître.

Yvan, petit-fils de boulanger, s’en lèche les babines à l’idée des métaphores boulangères que la campagne présidentielle ne manquera pas encore de susciter d’ici le joli mois de mai. Tous les candidats promettent d’ores et déjà des Bäckesch Dozen, des treize à la douzaine et l’ami Fränk, le boulanger, fait remarquer que, de toute façon, il vaut mieux aller au moulin qu’au médecin. Hélas, le lendemain de l’« attentat », le candidat socialiste a dû affronter les médecins hospitaliers, mais face aux hommes en blanc, l’homme en blanc s’en est mieux tiré que le pauvre Henri IV lors de la fameuse Journée des farines en 1591.

Force est de constater que François, le désempâté, se trouve aujourd’hui comme coq en pâte sur la crête des sondages et que la Hollande reste le pays des moulins … à vent. Mais depuis Schubert nous savons qu’il faut se méfier des belles meunières, fussent-elles psychotiques comme cela semble bien être le cas de la pauvre Claire Séguin qui, dès le soir de son passage à l’acte, s’est retrouvée à la fameuse Infirmerie Psychiatrique de la Préfecture de Police de Paris.

Le fou, disent les psychanalystes, prend les mots pour les choses ou, si vous voulez, les maux à la lettre. Et un candidat, c’est forcément blanc. Le mot vient en effet de candidus, la couleur blanche de la toge que revêtirent, dans la Rome antique, les candidats pour prouver leur probité.

À l’inverse de la chèvre de son homo-nyme, Madame Séguin voit le mal partout et elle est devenue, au fil des pages de son blog, « un micro sous votre oreiller », ce que les psychiatres appellent une persécutrice persécutée. Le monde entier lui en veut, l’épie, l’insulte et l’empêche même d’émigrer. Droite et gauche sont pour elle ejusdem farina et quand, l’autre jour, Sarkozy est venu rendre visite à la bonne ville de Lille et à sa maire, elle a jeté, du haut du beffroi, 6 000 « très petits papiers » qui demandèrent avec une belle ironie « jusqu’où iront les Sarkobry ? »

La dame, professeure de lettres, a incontestablement du talent et manie le clavier de son blog avec la verve d’un Voltaire, il est vrai de province des Flandres. Ses propos, écrits et gestes ne sont point incohérents, comme on a pu le dire, mais d’une implacable logique, systématique et folle. D’après les doctes manuels de psychiatrie, elle serait atteinte de paranoïa qui signifie littéralement « logique à côté de la plaque ». Souhaitons lui d’être enfin soulagée de son authentique souffrance, saluons l’artiste qui, par son passage à l’acte, a mis le doigt sur le fonctionnement parfois paranoïaque de nos démocraties occidentales et retenons enfin, comme morale de cette histoire, que si les fous détestent Hollande, les dingues votent Sarkozy.

Yvan
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