Musique live

Comme à la casa

d'Lëtzebuerger Land du 23.10.2020

Greg Lamy arrive sur la scène d’Opderschmelz décontracté comme à son habitude. Le fait qu’il a foulé ces planches tant de fois joue forcément sur son aisance en ce vendredi 16 octobre au soir. Il tapote son micro éteint qui se met en branle après quelques secondes. « Est-ce que ça fonctionne ? ». Les petits coups portés sur l’appareil font penser aux trois coups traditionnels qui lancent une représentation théâtrale. Ce petit geste est suivi d’un court speech. Sourire amusé aux lèvres, manches de chemises retroussées, il prend d’abord la température du public. « Ça va ? ». Quelques approbations fusent depuis l’arrière de la salle. Le guitariste plisse les yeux, il reconnait beaucoup de gens. « On est à la casa ce soir » lance-t-il avant d’avouer qu’il n’était plus remonté sur scène depuis des mois. Il confesse encore, en charriant, « j’espère que ça va vous plaire, on a perdu l’habitude ».

Avec les incontournables Gautier Laurent à la contrebasse et Jean-Marc Robin à la batterie, Greg Lamy vient présenter de nouvelles compositions extraites de son prochain album Observe the Silence. Un opus à paraitre chez Igloo Record en « janvier ou février 2021 ». Pas de tralala, ni de cérémonial pompeux, les musiciens vont droit au but et jouent avec plaisir pour un public acquis à leur cause. Le premier morceau joué, titre éponyme du projet, est assez difficile d’accès. Le jeu est compressé. Le rythme viendra plus tard. Pas d’applaudissements à la fin de la pièce puisque l’audience est invitée à observer le silence d’un moment suspendu. Tout un concept exécuté de manière spontanée par un public à l’écoute. Greg Lamy n’est pas la seule tête d’affiche de la soirée puisque le trompettiste italien Flavio Boltro vient prêter main forte aux musiciens qui réinterprètent en contrepartie certaines de ses compositions comme First smile. Le set prend une tout autre tournure avec l’arrivée d’un instrument à vent. Habituellement, cette fonction est assurée par le saxophoniste Johannes Müller, quatrième membre du Greg Lamy Quartet.

Arrive I Know, morceau à la ligne de basse et à la mécanique toutes deux implacables. On repense à Control Swift, très réussi titre phare de leur projet Press Enter (2017). I Know se révèle être sur scène un morceau du même acabit. Flavio Boltro a devant lui tout un boulevard pour improviser, mais ses saillies jazzesques sont encore trop contenues. Il est beaucoup plus à l’aise sur ses propres compositions swings. Jean-Marc Robin, dont les acrobaties percussionnistes ne sont plus à démontrer, enchante à nouveau les amateurs de roulements et de caisses claires. Gautier Laurent dénote particulièrement sur une introduction aux couleurs de théâtre traditionnel japonais. C’est que ses cordes nous font souvent voyager. On retient encore My dearest (for Camille part I), une jolie composition dédiée à la fille du guitariste où les à-coups de son instrument prennent des airs de petits pas trottinant sur un tapis. Jolie illustration de la petite enfance qui vient clore un concert à la cool, pas forcément inspirant mais toujours plaisant.

Kévin Kroczek
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