Fête du film d'animation

Festival cherche public

d'Lëtzebuerger Land du 08.06.2006

Et pourtant tout s'annonçait si bien! Le 26 mai, la Fête du film d'animation célébrait sa soirée d'inauguration devant une salle comble à la Kultufabrik avec quatre courts-métrages dont Le Gardien du Nid d'Olivier Pesch et The Tell Tale Heart de Raul Garcia, qui brillaient respectivement par leur niveau technique et leur mise en scène efficace. Mais une fois l'euphorie autour des avant-premières luxembourgeoises passée, toute motivation du côté du public comme du côté de la presse, pour assister notamment aux nombreuses séances de courts-métrages, semblait avoir disparue. Ainsi, bon nombre de perles des deux pays à l'honneur, la France et le Japon, passèrent littéralement inaperçues sur l'écran du Kinosch. À commencer par deux hommages. D'abord Overtime de Thibault Ber-land, inversant les rôles entre des marionnettes Kermit et leur maître défunt pour une chorégraphie macabre en mémoire de l'inoubliable Jim Henson. Ensuite, Calypso is like so, pour lequel le réalisateur Bruno Collet a intégré la filmographie complète de Robert Mitchum dans une seule histoire comique et originale. Côté humour, La révolution des crabes d'Arthur de Pins marquait un des moments forts. Racontant l'histoire d'un crabe qui refuse de se déplacer latéralement comme tous les autres, ce court-métrage tenu dans un style graphique épuré thématise la peur humaine du renouveau. Parmi les contributions japonaises, on a surtout retenu Memories, un ensemble de trois courts-métrages, dont notamment le deuxième intitulé Stink Bomb, réalisé par Katsuhiro Ôtomo. Satire sans compromis sur la politique extérieure américaine, il relate l'histoire d'un jeune scientifique, por-teur d'un virus mortel devenu ennemi de l'état malgré lui. Pour Robot Carnival, une autre série d'animations présentée et consacrée aux questions éthiques autour de la robotisation, Presence de K. Morimoto, dans lequel un inventeur tue sa fille robot proposait l'approche la plus intéressante du sujet. Hors des écrans, les ateliers pédagogiques ont connu le plus d'affluence. Les réalisateurs Dan Wiroth et Olivier Pesch y proposaient des introductions aux différentes formes et techniques de l'animation. Autre projet éducatif, le DVD-Rom Réaliser son propre film d'animation, présenté par André Faber a su convaincre par son contenu mais non pas par sa maniabilité. Après un débat organisé par l'Association pour l'enseignement de l'audiovisuel, du cinéma et des arts acoustiques (Aca), révélateur d'un manque de dialogue entre le ministère de l'Éducation nationale et les enseignants, la Fête du film d'animation revint à son sujet principal et proposait le jeudi 1er juin la projection de la BD La ville qui n'existait pas d'Enki Bilal  accompagnée par quatre musiciens autour d'Alain Rellay. Ce spectacle proposait un mariage réussi entre la mélancolie du jazz et celle des images grisâtres et pluvieuses d'une histoire sur le déclin industriel d'une ville du Nord de la France. Jacques-Remy Girerd, réalisateur de La prophétie des grenouilles était au rendez-vous pour la clôture du festival et exposait un point de vue indépendant sur l'animation. Adepte d'un style simple et poétique, cet auteur du dessin animé refuse de se figer dans les « contraintes graphiques de la 3D » et propose une alternative complémentaire aux grandes productions américaines. Malgré une programmation riche et variée, l'absence du public, éventuellement explicable par une communication trop peu conséquente, des long-métrages déjà vus sur nos écrans, mais aussi par un public luxembourgeois inerte et habitué aux grands noms, pose sans doute un problème de survie à cet événement pourtant unique dans la région.

 

Fränk Grotz
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