Courrier électronique

L’Allemagne aura bientôt des adresses email officielles

d'Lëtzebuerger Land vom 08.07.2010

L’Allemagne se prépare à introduire des adresses de courrier électronique officielles, qui permettront une identification univoque de l’expéditeur ou du destinataire et sont notamment censées rationaliser la correspondance entre citoyens et administration. Le modèle retenu pour les adresses est nom.prénom@fournisseurdacces.de-mail.de, avec l’option, pour distinguer les homonymes ayant le même fournisseur, d’ajouter un numéro après le nom. Bien que l’introduction effective ne soit pas attendue avant la fin de l’année, les personnes intéressées peuvent dès maintenant pré-réserver leur adresse auprès des fournisseurs d’accès GMX et Web.de, ce qui augmente leurs chances de pouvoir bénéficier d’une adresse sans numéro. Pour ce faire, il faut se rendre auprès d’un guichet administratif muni d’une carte d’identité ou d’un passeport pour remplir un formulaire ; c’est l’administration qui transmet la requête au fournisseur d’accès, ou plutôt en l’occurrence au fournisseur d’adresses De-Mail.

Il y a quelques jours, le ministre allemand de l’intérieur Thomas de Maizière a cité De-Mail comme exemple des « services de base sûrs » que l’État entend offrir sur le Net, au même titre que le maintien de la neutralité de réseau et un accès pour tous. Il aura donc fallu quelque quinze ans pour que l’email, qui a longtemps été l’application la plus populaire du Net, commence à assumer un rôle officiel comparable à celui du courrier papier, opposable par exemple devant un tribunal. Il y a une dizaine d’années, les architectes du Net comptaient sur les certificats pour ajouter cet attribut au courrier électronique, mais ceux-ci ont manifestement fait long feu. Les adresses certifiées de type De-Mail feront-elles mieux ? À première vue, les législateurs allemands ont prévu un dispositif complet, comprenant une loi instituant un « portail citoyen » et un contrôle rigoureux des fournisseurs d’adresse. Pour être agréés, ces derniers devront démontrer qu’ils sont en mesure de respecter un certain nombre de critères en matière de cryptage et de stockage.

Les courriers adressés à ou depuis une adresse De-Mail auront donc la même valeur que leurs équivalents papier. Contrairement aux courriers électroniques communs, les courriers De-Mail seront payants : un simple De-Mail coûtera quinze cents. Grâce à des accords de collaboration entre les fournisseurs de ces adresses et des prestataires de services postaux, De-Mail permettra aussi d’envoyer des courriers à des personnes ne disposant pas d’une adresse email, pour le prix de 54 cents. Dans ce cas, le contenu du mail sera imprimé et remis sous enveloppe au destinataire à son adresse physique : il s’agit du service dit « hybride ».

Le lancement de De-Mail à l’échelle nationale intervient après une phase pilote de six mois effectuée avec succès à Friedrichshafen, qui s’est terminée en mars dernier. Le service y a notamment été utilisé pour l’envoi de pièces administratives telles qu’actes de naissance ou confirmations de séjour pour les résidents étrangers, permettant aux citoyens concernés d’éviter de se rendre au guichet pour obtenir ces pièces. Le « monsieur informatique » du gouver-nement allemand indique sur sa page web (www.cio.bund.de ) que le nouveau dispositif s’adresse aux citoyens et aux administrations, mais aussi aux sociétés, banques et assurances. Un assureur a ainsi permis à cinquante assurés de Friedrichshafen dotés d’une adresse De-Mail de déclarer des sinistres par ce biais. Les démarches relatives à l’obtention d’un permis de construire ont également été testées : elles ont généré auprès des utilisateurs le souhait d’une augmentation de la mémoire allouée à chaque compte au-delà de cent MBytes.

De-Mail est censé contribuer à réduire le volume des courriers échangés en Allemagne chaque année, soit 19,2 milliards d’unités. On estime que la moitié de ces courriers revêtent une signification légale : pour ceux-ci, De-Mail autorisera enfin leur envoi par voie électronique, ce dont les juristes se sont toujours méfiés jusqu’ici en raison de l’incertitude quant à l’identité du détenteur du compte de messagerie.

Jean Lasar
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