Radio 100,7

100,7 * 15

d'Lëtzebuerger Land vom 18.09.2008

Pour Fernand Weides, c’est aussi une histoire sentimentale. Ce soir, quinze ans jour pour jour après son lancement, la radio de service public 100,7 célébrera son anniversaire avec une fête culturelle à l’Abbaye de Neumünster. L’Abbaye, parce que c’est le lieu par excellence habité par l’esprit de Robert Krieps, l’ancien ministre socialiste de la Culture des années 1970, mort en 1990, et qui a si fortement marqué les esprits de la gauche. Il y avait été incarcéré durant la deuxième guerre mondiale, il a œuvré pour le reconversion de l’ancienne prison et le tract central porte même son nom. Aux yeux du directeur de la radio 100,7, Krieps est le vrai père de la radio, « j’ai d’ailleurs toujours dans mon tiroir le premier concept d’une radio de service public que j’avais écrit pour lui jadis, » se souvient-il. 

C’est que les débuts de la radio furent longs, très longs, de la genèse en passant par la mise en œuvre dans le cadre de la loi sur les médias électroniques de 1991 et les premières émissions durant l’après-midi seulement, jusqu’à ce que la radio diffuse enfin en continu, en juin 1997. Puis il y eut les changements internes, trois directeurs en l’espace de deux ans – Fernand Weides a commencé en juillet 1994 –, plusieurs rédacteurs en chef se sont succédés et deux déménagements ont eu lieu en quinze ans. L’ennemi public numéro un de la radio des débuts s’appelait RTL Radio Lëtzebuerg, radio privée qui jouissait du monopole de radiodiffusion au Luxembourg depuis 1933 et s’inquiétait de voir ses auditeurs la déserter. Or, depuis 1991, le marché a bien changé, avec l’arrivée des autres radios privées, Eldoradio, DNR, Ara, qui ont chacune développé leur profil et trouvé leur place. Depuis 1997, lorsque RTL s’est vue attribuer une deuxième fréquence pour atteindre ses auditeurs là où 92,5FM avait des trous, la cohabitation entre les deux chaînes semble s’être pacifiée, voire banalisée.

Tout naturellement, la radio 100,7 a occupé les créneaux que son aînée commerciale abandonnait : la musique classique surtout, mais aussi une programmation pop-rock plus pointue, qui ne soit pas dictée par une rotation des hits du moment, mais propose des découvertes selon les goûts des animateurs. La matinée est réservée aux émissions pédagogiques à texte, philosophie et éducation. Le ton est plus calme, posé, les émissions plus longues, les informations essaient d’être plus explicites, il y a plus de culture et surtout pas de coupures publicitaires. Car la radio est entièrement et exclusivement financée par le budget de l’État, dont elle reçoit cette année 3,9 millions d’euros. 

Si l’auditeur-type de la radio est « un enseignant mâle de 43 ans qui habite Limpertsberg » selon le directeur des programmes Claude Mangen (Télécran, 39/2008), Fernand Weides est fier de constater que la radio progresse sur la tranche des 35-50 ans – alors que longtemps, la majorité de ses auditeurs avaient plus de cinquante ans. Selon le dernier sondage TNS-Ilres Plurimedia datant de juin, la radio touche 4,1 pour cent de la population, mais Fernand Weides préfère citer les chiffres de l’écoute globale, qui se situe aux alentours de 22 pour cent. « Notre grand défi des prochaines années sera de nous adapter aux changements sociologiques et linguistiques de la population luxembourgeoise, » dit-il. Ou : comment toucher les jeunes, qui écoutent de moins en moins la radio pour se rabattre sur l’ordinateur et des systèmes MP3, qui leur permettent d’emporter leurs propres playlists 

Ou encore : comment offrir un programme attractif pour toutes les communautés, aussi les francophones, voire les anglophones ? L’idée de réintroduire un programme d’informations en français, qui avait été abandonné pour des raisons financières en 2004, est à l’étude. Parallèlement, la radio a lancé une procédure pour avoir une deuxième fréquence afin de combler les ruptures de couverture dont elle souffre, notamment dans le Nord, l’Est et le Sud du pays. En 2007, Fernand Weides a eu soixante ans, mais refuse de répondre à la question de son départ à la retraite. 

josée hansen
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