La simplification, le grand combat du commissaire européen à l’agriculture. Christophe Hansen en a présenté les contours mardi, sur la Moselle. La minstre Martine Hansen applaudit

Simplifier, c’est compliqué

d'Lëtzebuerger Land vom 16.05.2025

Le domaine viticole de Jeff Konsbrück, à Ahn, avec vue imprenable sur les falaises du Palmberg, se prêtait à l’exercice. Mardi, le commissaire européen à l’agriculture Christophe Hansen a passé sa journée au Luxembourg, enchainant une entrevue avec le Grand-Duc le matin et deux visites l’après-midi. La première chez le vice-président des vignerons indépendants et la seconde à Pintsch (commune de Kiischpelt), où il a rencontré l’éleveur de limousines et de wagyus David L’Hortye. Pour l’occasion, il était accompagné de sa cousine Martine, ministre de l’Agriculture.

Arrivés en avance, ils ont d’abord devisé viticulture avec le comité de l’Organisation professionnelle des vignerons indépendants (OPVI), présent au grand complet. Il était question du « Wine package », présenté le 27 mars dernier qui vise à redynamiser un secteur qui souffre. Guy Krier, président de l’OPVI, n’a rien contre le fait qu’un vin désalcoolisé soit considéré comme un vrai vin, tant que le produit originel est élaboré selon les techniques traditionnelles avant sa transformation. « Ça ne change pas grand-chose pour nous, c’est un produit de niche », avance-t-il. Jean-Marc Schlink, trésorier de l’OPVI, en étiquette 6 000 bouteilles chaque année (vin tranquille et mousseux) et « cela suffit pour répondre à la demande. »

Les vignerons indépendants, par contre, voient d’un mauvais œil la possibilité donnée aux États d’offrir des primes à l’arrachage. « Nos collègues allemands sont obligés d’arracher leurs vignes s’ils ne les cultivent plus ou alors les autorités le font pour eux et envoient la facture : ça, c’est la bonne solution ! » Il faut dire que la grande majorité des friches sont la conséquence du désengagement de vignerons âgés de la coopérative Vinsmoselle. Les indépendants ne sont pas concernés. Sauf que ces friches sont des foyers pour le mildiou et l’oïdium, qui contaminent les vignes voisines. « Pourquoi donner de l’argent à ceux qui arrêtent, c’est nous qui en avons besoin ! », fait remarquer le plus grand vigneron bio du pays (quinze hectares). Serge Fischer, directeur de l’Institut viti-vinicole de Remich, juge l’outil « intéressant ». Cela promet une chaude ambiance lors du prochain Wäibaudag, dont ce sera le sujet principal.

De l’aide pour les petits producteurs

Mais la vraie grande affaire du jour était la divulgation du premier volet du plan de simplification pour l’agriculture. Selon les calculs de Christophe Hansen, il pourrait faire économiser 1,58 milliard d’euros par an aux agriculteurs et 210 millions d’euros aux États. L’idée est simple, son application sans doute beaucoup moins. Toutefois, Christophe Hansen espère qu’elle sera effective dès l’année prochaine. Le plafond des paiements forfaitaires sera relevé pour les petits agriculteurs. Un seul contrôle devra être effectué chaque année dans les exploitations. Le soutien financier lors des catastrophes naturelles sera plus important et réactif, une subvention de 50 000 euros sera remise aux exploitations renforçant leur digitalisation… L’éventail est large.

Le Chrétien-social assure que cette simplification ne se transformera pas en dérégulation, même s’il a déjà annoncé que la tonalité de la nouvelle PAC tranchera avec la précédente. « Je veux inciter plutôt que contraindre », a-t-il rappelé. Quid des objectifs environnementaux inscrits dans le Green Deal ? « Lorsqu’ils ont été définis au Parlement européen, on aurait dit une vente aux enchères et ils ne seront finalement pas atteints car ils n’étaient pas réalistes. Promettre ne sert à rien, je préfère donner des moyens d’agir. »

Il lui reste maintenant à convaincre le Conseil et le Parlement européens pour concrétiser son plan et régler des questions loin d’être accessoires, comme la protection des données. Le partage d’informations entre différentes administrations n’aura rien d’une évidence juridique. Mais il aura le soutien sans faille de Martine Hansen : « La lourdeur administrative actuelle est inacceptable. Plus on simplifiera et plus on gagnera en productivité ». Et tant pis pour les pots cassés.

Note de bas de page

Erwan Nonet
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