Fiscalité des sociétés

Rognures

d'Lëtzebuerger Land vom 11.10.2007

Le projet de budget 2008 a été crocheté sur fonds de crise financière.Les déboires du marché immobilier américain péseront évidemmentsur la croissance de la zone euro et coûteront aussi des points à l’économie luxembourgeoise dont 40 pour cent de la valeur ajoutée dépend du secteur financier directement et indirectement. En 2008, le taux de croissance attendu n’est plus que de 4,5 pour cent et non de cinq comme les prévisions du Statec d’août dernier le prévoyaient. Mercredi, le service national de statistiques a d’ailleurs revu ses estimations de croissance pour le quatrième trimestre 2006 (+5,2 pour cent en glissement annuel contre 6,1 p.c. initialement programmés) et pour le premier trimestre 2007 (+4,7 au lieu de 6,2 p.c.). Le second trimestre sera marqué par une hausse de 5,3 p.c. du PIB, selon la première estimation du Statec. 

Les effets de la crise des subprimes ne se feront sentir qu’au troisième trimestre 2007. Et encore faudra-t-il attendre la publication des résultats des banques pour en connaître le véritable impact. Comme prévu, les priorités du gouvernement Juncker ont été entièrement focalisées sur la fiscalité des ménages avec un allègement de la facture des impôts sur le revenu et un bonus pour enfant à charge financé par la caisse d’allocations familiales.

Les ménages sont les enfants gâtés du projet de budget 2008.À côté, les entreprises passent presque pour les rejeton oubliés.Le projet de budget 2008 prévoit bien une limitation du droit d’apport à 0,5 pour cent en 2008 au lieu du taux d’un pour cent qui frappe actuellement le rassemblement de capitaux. On cherchera vainement d’autres cadeaux. La suppression du droit d’apport, appelée de ses voeux par la Commission européenne, est désormais un acquis. Cet impôt jugé « antiéconomique » par les milieux financiers sera supprimé en 2010 « de manière à répondre aux impératifs de la stratégie de Lisbonne ». Le gouvernement n’a pas fourni d’autres détails sur la manière dont il compte s’y prendre pour en arriver là. 

Cette abolition enlève une épine du pied aux autorités grand-ducalesqui doivent aujourd’hui s’expliquer sur les dérogations à ce droit d’apport dont bénéficient certains produits financiers comme les fonds de pension, les fonds d’investissement spécialisés et lessociétés à capital risque (Sicar). Bruxelles a d’ailleurs pris ces Sicaren grippe, en voyant volontiers dans le plafonnement à un forfaitde 1 250 euros, dont elles bénéficient au titre du droit d’apport,une aide d’État défendue par les règles du jeu communautaire.Le gouvernement a promis de faire un geste pour les patrons endehors du dispositif budgétaire. Jean-Claude Juncker leur a fixérendez-vous en novembre pour se mettre d’accord sur les amnagements possibles de la fiscalité des entreprises. Il est probable que la question des intérêts notionnels, permettant d’alléger la feuille d’impôt sur le revenu des collectivités y figure en bonne place.

Dans l’immédiat, le gouvernement devrait encore faire une fleuraux entreprises, notamment celles du secteur de la logistiquequi est vu comme un débouché prometteur de l’économie luxembourgeoise en quête de diversification. Attendu dans le cadrede la loi budgétaire, mais repoussé au dernier moment, un dispositifintroduisant un régime de représentation fiscale en matière de TVA devrait être adopté prochainement, et aurait même des chances de passer encore aujourd’hui le cap du conseil de gouvernement.Ce serait, dit-on, un signal fort de la part des autorités pour donner du sens à l’ambition de faire du Luxembourg un des principaux centres de logistique en Europe. 

Véronique Poujol
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