Ombudsman

Fin de parcours

d'Lëtzebuerger Land du 28.10.2011

Au bout de huit ans de médiation au Luxembourg l’ombudsman Marc Fischbach a présenté hier son dernier rapport d’activité – son mandat expire l’année prochaine. Il a réussi à donner une assise à sa fonction et l’existence de cette institution n’est plus à remettre en cause. 7 260 réclamations, 23 000 demandes d’informations introduites par les citoyens en prouvent la nécessité. Or, cela montre aussi que ses services ne s’occupent pas exclusivement de plaintes concernant les administrations de l’État, des communes et des établissements publics – ce qui est pourtant son core business –, mais que ses ressources sont aussi accaparées pour fournir des informations sur les méandres des procédures et démarches administratives. La question se pose de savoir si c’est vraiment son rôle. C’est la raison pour laquelle Marc Fischbach propose aux pouvoirs publics de créer un guichet unique physique, de conseil et d’orientation, bureau composé de fonctionnaires spécialisés et expérimentés. Car de nombreuses personnes ne savent pas se servir de l’outil informatique du guichet unique en ligne.

Un important retard est donc en train d’être comblé – la Suède connaît cette institution depuis 1809 – et les 45 recommandations émises jusqu’ici à l’adresse du gouvernement s’évertuent à redresser certaines mauvaises pratiques des administrations qui se font aux dépens des citoyens. La réforme du système pénitentiaire, attendue pour les prochaines semaines ou le conseil national de la justice en sont deux exemples. La fonction de médiateur représente un changement de paradigme au Luxembourg, où le citoyen est encore trop souvent réduit à un rôle de quémandeur d’un service public alors que ce dernier est là pour le servir et non l’inverse. La population s’attend à un porte-parole qui, saisi par de multiples requêtes, tente d’en extraire la substantifique moelle pour pointer du doigt des tendances générales, des comportements inadéquats, des mentalités périmées.

Éviter que la démocratie ne s’enlise, demander des comptes aux pouvoirs publics pour vérifier leur légitimité, formuler de nouvelles exigences pour faire avancer le schmilblick et faire cesser les « réflexes souverainistes » de certains ministres qui ont tendance à interpréter les lois de manière plus restrictive que ne l’entendait le législateur. Le médiateur doit en quelque sorte faire le lien entre les réalités du terrain et ceux qui nous gouvernent. Son impartialité et son indépendance doivent en être le garant. Et c’est justement son appartenance au parti conservateur, sa carrière de ministre qui avait jeté un soupçon sur l’impartialité du médiateur, dès le départ de son entrée en fonction. Finalement, ces appréhensions n’ont pas été confirmées, peut-être aussi parce que les quelques années passées en tant que juge à la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg lui avaient ouvert l’horizon.

Or, tous ses efforts resteraient sans effet s’il n’y avait derrière une commission des pétitions efficace. Et les avancées en sont là encore tributaires de l’engagement personnel de ses membres députés, de leur persévérance pour faire le suivi des dossiers et de vérifier si les recommandations ont été mises en pratique.

En parallèle, le médiateur souhaite « contribuer à l’émergence d’une société plus participative dans laquelle les citoyens sont disposés à prendre en charge leur propre destin et à s’investir davantage dans les affaires publiques ». Or, la suite logique d’une émancipation des citoyens est de renforcer, voire augmenter leurs droits – notamment le droit à l’information. Mais sur ce point, il n’y a guère eu d’avancées.

anne heniqui
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