Schoul Doheem

Les comptines du confinement

d'Lëtzebuerger Land du 02.04.2021

Connaissez-vous l’histoire du hérisson qui ne voulait pas être un hérisson ? D’Geschicht vun Igel, dee kee wollt sinn, en version originale. Ce petit conte qui rassemble pas loin de 5 000 vues sur Youtube depuis un an est un des premiers jalons de Schkabetti, le projet mené par un couple d’enseignants pendant le confinement. L’histoire, écrite par Bruna Rampini a Romy Grandgenet, est racontée et surtout illustrée par Annick Sinner, enseignante et illustratrice. Son mari, Eric Falchero réalise la mise en sons et en musique. Si les initiateurs de Schkabetti sont tous les deux enseignants, ils se distinguent aussi par leur travail artistique, elle comme illustratrice, lui comme musicien (Lego Trip, Dream Catcher ou Krunnemécken).

« En mars 2020, on s’est retrouvé en famille à la maison, ce qui n’arrive pas souvent, avec beaucoup de temps et besoin de s’occuper », se souvient Annick Sinner. Institutrice auprès des tous-petits de l’école précoce, elle sait à quel point il était important que les jeunes enfants continuent à entendre parler luxembourgeois, en particulier ceux qui ne le parlent pas à la maison. Avec Pâques en ligne de mire, le couple se lance dans la mise en images d’une première histoire autour du lapin, des œufs et des couleurs : quelques planches dessinées qui se succèdent sur la voix d’Annick et les sons d’Eric. Posté sur les réseaux sociaux, le récit illustré sera un succès qui les incite à poursuivre. « On ne connaissait pas grand-chose aux techniques d’animation, on a fait avec les logiciels classiques et avec le matériel dont on disposait à la maison. Progressivement, on s’est amélioré », raconte le musicien qui réfléchit maintenant à se doter d’un appareil photo plutôt que de réaliser les images avec son téléphone.

Le résultat est très simple, très mignon. Annick Sinner explique : « Quand on s’adresse aux petits, il faut être basique, réduire le dessin pour qu’il colle aux mots. Le noir et blanc fonctionne très bien dans ce cas. » « On veut donner aux enfants des choses rigolotes et jolies qui ne sont pas trop pédagogiques : ce ne sont pas des listes de vocabulaire », renchérit Eric Falchero pour qui c’était aussi « une façon de créer quelque chose ensemble ». Le compte Youtube Schkabetti (la manière enfantine de dire spaghetti comme le déformait la fille du couple quand elle était petite) s’est enrichi de nombreuses histoires, chansons et comptines : une par jour pendant le confinement de printemps, dont certaines récoltent pas loin de 10 000 vues.

Depuis, le site schouldoheem.lu a référencé Schkabetti et le couple continue à explorer les contes et chansons luxembourgeoises pour les enfants. Le Boxemännchen a ainsi fait son apparition autour de Noël et Goldie an di dräi Bieren (créé pour le Festival des marionnettes 2018) est proposé en version filmée. Certains textes sont signés d’autrices amies, d’autres sont puisés dans le répertoire traditionnel. « Il y a une quantité incroyable de comptines, mais certaines ne sont plus du tout adaptées à l’époque ou s’avèrent trop noires et violentes pour les petits », estime Falchero en citant des textes sexistes ou avec des animaux morts (les classiques enfantins en français ne sont plus tendres quand il s’agit de plumer une alouette ou de tremper une souris dans l’huile). Schkabetti prouve en tout cas qu’il fait parfois bon s’ennuyer pour développer sa créativité.

France Clarinval
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