Avec son nouvel album, Pascal Schumacher passe du soleil à la lune, concert à l’appui

Une Luna envoûtante

d'Lëtzebuerger Land du 08.04.2022

L’idée était celle-ci : sortir de ma zone de confort (expression à la mode en ce moment, n’est-il pas !) et aller voir un artiste dont je ne connais absolument rien si ce n’est qu’il joue du vibraphone et, qu’apparemment, il est bien plus connu que je ne le pense, surtout à l’étranger ! Bref, j’allais me rendre au concert – à la Kufa s’il vous plait, de Pascal Schumacher, vibraphoniste de son état !

Mais, au fait, c’est quoi au juste un vibraphone ? Et bien, le vibraphone est un instrument de musique, de la famille des instruments de percussion, et plus précisément de la branche des claviers. Souvent confondu avec le xylophone, le vibraphone est constitué de métal et non de bois. Mais pour être tout à fait honnête avec vous, ça ressemble quand même vraiment à un xylophone !

Le concert est assis ; l’artiste sera seul sur scène. Il est 20h15, les lumières s’éteignent… Le silence est religieux dans la salle où une grosse centaine de personnes ont pris place. Pantalon noir, pull en V noir également, Pascal Schumacher débute son set et l’on comprend très vite que l’artiste est d’une concentration extrême, semblant littéralement faire fi du public présent. Et le paradoxe entre le côté très « rock épuré » de la salle eschoise et les sons tellement légers du vibraphone est bluffant. La sobriété de la scène n’a d’égal que l’impressionnante qualité des lumières qui, tantôt bleues, tantôt or, se reflètent sur les tubes résonateurs de l’instrument. C’est beau, vraiment beau !

Techniquement parlant, ça fait un peu penser aux singers songwriters de l’époque qui, seuls sur scène, se samplaient jusqu’à obtenir un véritable orchestre virtuel pour accompagnement. Schumacher utilise un peu la même méthode même si c’est véritablement le vibraphone la star de la soirée. Quand on ferme les yeux, on s’envole facilement vers de grands espaces. Les yeux, mon voisin semble les avoir fermés un peu trop longtemps si j’en crois les quelques ronflements qui arrivent à mes oreilles. Mais passons !

La musique de Pascal Schumacher ressemble quasiment à du rock progressif… mais sans le côté rock, vous saisissez ? Un peu comme si Genesis – période Peter Gabriel – se lançait dans une longue improvisation d’1h30 sans batterie. C’est planant, parfois surprenant mais toujours doux et léger. On nous aurait installé un décor avec des cerisiers japonais dans le fond que ça n’aurait absolument pas dénaturé la chose.

Surfant sur ses deux derniers albums (Luna, le petit dernier et Sol, son premier effort solo), Schumacher livrera, 90 minutes durant, un spectacle à la fois remarquablement calibré et totalement envoûtant juste entrecoupé, çà et là, par quelques explications sur sa musique, son choix de salle ou encore où se procurer Luna en version vinyle.

L’artiste a, une nouvelle fois ce soir, prouvé qu’il fait partie de ces musiciens surdoués qui, à l’instar d’un Francesco Tristano ou d’un David Ianni, ont brillamment réussi à passer la frontière et jouent aujourd’hui sur les plus belles scènes du monde. Car, l’air de rien, après cette date à la Kufa, Schumacher s’envolera pour l’Allemagne, la Norvège, la France ou encore la Suède, toujours pour présenter Luna. Pas mal pour un garçon qui, « accessoirement », est aussi enseignant au Conservatoire de Luxembourg et joue aussi régulièrement en format jazz quartet !

À la sortie de la salle, les réactions étaient unanimes pour saluer le talent unique du musicien, mais également sa touchante modestie et sa gentillesse. Nous, on lui tirera notre chapeau d’avoir choisi la Kufa comme base de lancement de sa tournée européenne. Un geste qui en dit long sur un artiste aux multiples facettes et qui mettra toujours la qualité du son comme atout majeur de sa musique ! Bravo, Monsieur Schumacher ! Et longue vie à Luna…

Romuald Collard
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