Arts plastiques

Résister à la technologie

d'Lëtzebuerger Land du 21.08.2020

Qu’est-ce qu’une sculpture ? Que représente-t-elle ? Quelle est la perception du spectateur ? Que retire-t-il de son expérience ? Max Mertens n’en est pas à sa première démonstration du genre, sur le mode du détournement ludique. Cette Sollbruchstelle, est dans la lignée directe de wrecking hammer de 2014 (Das weisse Haus, Vienne, Autriche), où, déjà, des marteaux, mus par l’air produit par des ventilateurs, venaient endommager une paroi.

On peut remonter encore plus loin dans le temps. En 2009, Mertens avait terminé deux ans plus tôt ses études d’art et de la pratique communicative à l’Université des arts appliqués de Vienne. Au feu pavillon près du Pont Adolphe, cet ancien kiosque à journaux que l’Aica (Association internationale des critiques d’art) avait réussi à transformer en espace de présentation d’œuvres de jeunes artistes luxembourgeois, le passant déclenchait, à son insu, de l’air qui venait gonfler un gros ballon rouge (Urban Games # 1).

Le terme allemand savant de Sollbruchstelle, titre de la plus récente des expérimentations du genre à Esch, cache un « point de cassure d’une zone prévue à cet effet ». Le visiteur est surpris par un marteau qui se met en mouvement et vient frapper, au même point d’impact un mur en briques. En fait, une fois qu’on a pénétré dans le pavillon eschois, on cherche à comprendre ce que représente cette sculpture : la superposition sur quelques rangées de ce matériau de construction courant, tenu sur les côtés par des triangles de bois, qu’on appelle dans le jargon architectural des étançons, utilisés pour empêcher une construction de s’écrouler.

Max Mertens a une prédilection pour les œuvres motorisées de Jean Tinguely. Dans ses Méta Matics (1959) animées par un moteur, des crayons créaient des tableaux sans l’action du peintre. Niki de Saint-Phalle, sa compagne, réalisait des peintures en projetant les couleurs à la carabine (Tirs, 1961). Soixante ans plus tard, Mertens interroge ainsi notre époque : machine versus être humain ? Comme le loup qui voudrait bien croquer l’habitant de la maison en briques dans l’histoire des Trois petits cochons ? À la fin de l’exposition, le mur sera sinon détruit, du moins pour partie effrité.

Sollbruchstelle de Max Mertens, à l’Annexe22, 1, Place de la Résistance, Esch-sur-Alzette, est à voir jusqu’au 5 septembre ;ouvert les jeudi et vendredi de 11 à 18 heures, les samedi et dimanche de 14 à 18 heures ; demande de visites guidées en groupe dans le respect du nombre limité à 10 personnes : www.esch2022.lu

Marianne Brausch
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