Exposition(s)

Brelan de peinture

Roland Quetsch s’avère peintre, non moins constructeur
Photo: Rolan Quetsch
d'Lëtzebuerger Land du 17.01.2020

Inutile de se donner la peine de chercher quelque point commun, un fil rouge qui mènerait de l’un à l’autre. Ils sont trois, dans l’ordre de notre progression dans la grande halle du Wandhaff, Roland Quetsch, Christian Floquet, Jim Peiffer, trois peintres, et sans doute, sans beaucoup de peine, aurait-on raison d’insister sur la couleur qui saute aux yeux, et avec de la bonne volonté, d’évoquer une certaine expressivité, qu’elle se manifeste dans la géométrie ou alors dans une figuration exacerbée. Laissons cela, on a la chance, le galeriste et les artistes en premier, d’avoir un espace de telle dimension, de telle organisation, qu’ils ont beau être trois, ils le sont en toute autonomie, chacun pour soi, et au visiteur il appartient d’y mettre son propre rythme.

De même, inutile de mentionner pour chacun des trois tels noms de l’histoire de l’art ; là encore, au visiteur d’établir les correspondances qu’il voit ou qu’il veut. Les noms qui viendraient à l’esprit ne seraient que des béquilles, empêcheraient de regarder et de juger par soi-même. Et à les choisir (trop) solides, ça n’étaye plus, ça cache, ça occulte.

Roland Quetsch s’avère peintre, non moins constructeur, par les matériaux qu’il emploie, par le traitement qu’il fait subir à ce qui constitue normalement une peinture. Il y a du bois, des couches comme dans un feuilletage, de la toile, de la fibre, et une belle iridescence se posant là-dessus. Des œuvres sont au mur, d’autres au sol, il leur arrive d’être tant soit peu maltraitées, trouées, des parties en sont rassemblées par des attaches, et quand par exemple comme des moitiés d’étoiles tombées on ne sait de quel ciel pour être si coloriées, sont posées sur leurs pointes, pour un peu on les surprendrait à bouger, à avancer.

De la variété, il en est dans les couleurs, jusqu’à ces belles peintures blanches, juste animées par quelque léger accent. De la variété, dans la présentation des plaques de bois, ce qui fait un entre-deux de peinture et de sculpture. Et c’est justement entre les deux que le visiteur poursuit son chemin, avant que son regard ne s’attache à plus de régularité, dans les acryliques de Christian Floquet où sur un fond, des formes géométriques, à angle droit, se détachent, des losanges par exemple dans une série de la plus grande harmonie, des formes, logiquement, et des couleurs.

Pas d’expérimentation autre, même si les formes peuvent varier légèrement, sans abandonner toutefois la stricte géométrie, que ce jeu, cette juxtaposition avec la couleur, la peinture donc réduite à ses constituants dans sa pureté, son essence même. À l’opposé, on ne peut plus extrême, de l’exubérance de Jim Peiffer.

Voilà une peinture qui a l’abondance de la végétation des pays tropicaux, d’une vitalité irrépressible. Et les totems qui balisent notre chemin ne s’opposent pas à pareille image, au contraire. Nous sommes dans une jungle de peinture, à coups de machette il faut couper les lianes, traits dansants, ronds tournants, pour découvrir telles scènes, telles figures. C’est un peu aussi comme si elles sortaient de quelque rêve, ou cauchemar peut-être. C’est foisonnant, c’est pléthorique, cela dit, c’est parfaitement maîtrisé.

Et pour nous changer, il est tels papiers, plus légers, tels portraits où le crayon réussit à nous faire passer bien de la sensibilité, avec toujours quelque chose qui inquiète peut-être plus qu’il n’émeut. Pour le reste, la peinture de Jim Peiffer renvoie au théâtre, et acteurs, costumes, actions et décors s’entremêlent dans une confusion bizarre, jubilante ou effrayante, à nous de décider.

Christian Floquet, Jim Peiffer et Roland Quetsch exposent chez Ceysson & Benetière au Wandhaff jusqu’au 15 février ; ouvert du mercredi au samedi de midi à 18 heures ; www.ceyssonbenetiere.com

Lucien Kayser
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