Saoulés

d'Lëtzebuerger Land du 06.06.2025

Le ministre de l’Économie, Lex Delles (DP), et sa collègue de l’Agriculture, Martine Hansen (CSV), ont présidé le mercredi 28 mai la réunion « kick-off » du « processus d’élaboration d’un nouveau concept et d’un plan d’action pour l’œnotourisme au Luxembourg », précisait l’invitation. On y explique que le processus devra fédérer « les communes, les vignerons, les commerçants, la coopérative, les syndicats et associations, l’Institut viti-vinicole, le ministère de l’Agriculture, etc. » La conclusion devra être présentée en décembre.

Mais las, en ce jour de grand lancement, de vignerons présents dans le centre culturel Machera de Grevenmacher, il n’y avait point. Ou presque. Aucun représentant officiel d’un des trois groupements (indépendants, coopérative et négociants) ne s’est déplacé. Pas de cadre de l’Institut viti-vinicole. Pas de dirigeant, non plus, du Fonds de solidarité viticole ni de son Comité stratégique, qui président pourtant à la destinée de la communication et du marketing de la viticulture nationale. II y avait des élus locaux, des représentants de quelques structures impliquées et aussi l’expert autrichien recruté pour guider la construction dudit plan.

Contactés par le Land, les vignerons qui sont tout de même les principaux intéressés ont été honnêtes. Un premier, acteur majeur, reconnaît s’être « un peu retiré de ces fonctions » et ne pas être au courant de la réunion. Un second l’a « complètement oublié » alors qu’il avait prévu d’y aller. Un autre était « en vacances ». Un quatrième devait « traiter ses vignes ». Un suivant avance le choix du calendrier, pas très heureux, à la veille du week-end de portes ouvertes « Wine, taste, enjoy  et d’un printemps toujours exigeant en termes de travail dans les vignes.

Jeff Konsbruck, vice-président des vignerons indépendants, qui assure aussi en ce moment la présidence tournante du Fonds de solidarité viticole (et donc du comité stratégique), ne tourne pas autour du pot : « Dans ces réunions, on parle, on parle… mais il ne se passe jamais grand-chose. Un collègue présent m’a fait un résumé et il n’y a rien de neuf. C’est toujours pareil et c’est démotivant. »

On ne lui donnera pas tort. Le dernier plan pour développer l’œnotourisme date de 2012. Il avait accouché du précité « Wine, taste, enjoy » et de la création d’une carte oenotouristique, bizarrement horizontale alors que la Moselle luxembourgeoise coule bien verticalement, du sud vers le nord. Cela valait bien un plan, des dizaines d’heures de réunions et plusieurs voyages d’études.

Gilles Estgen, président de l’ORT Moselle, vient d’être nommé « Coordinateur général de la stratégie nationale de l’œnotourisme ». Il parle de développer la mobilité dans la Moselle et vers la capitale, de créer des logements insolites dans les vignes… Mais sans les vignerons passablement échaudés par les expériences passées, ça risque d’être difficile. Pour les convaincre de participer activement, il va falloir être persuasif, proposer des idées nouvelles, excitantes et réalistes.

En 2023, Jeff Konsbruck avait introduit une demande pour installer quatre tiny houses juste devant sa cave, à Ahn : « L’Administration de l’environnement n’a pas voulu, on ne peut pas avoir d’activité hôtelière dans une zone verte. » Non, pour l’œnotourisme, ce n’est pas gagné.

Erwan Nonet
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