Cinéma

Hollywood, ton univers impitoyable

d'Lëtzebuerger Land du 26.02.2021

Remake d’un film méconnu des années 80, The Comeback Trail a de quoi faire saliver les cinéphiles : un scénario mélangeant coulisses hollywoodiennes, comédie et western, un casting cinq étoiles et un décor très seventies qui joue avec une belle dose de nostalgie. Pourtant, sans parler d’incident industriel, le film de George Gallo ne dépasse pas le stade de comédie gentillette.

George Gallo est loin d’être un inconnu dans l’univers du 7e Art. À 65 ans, celui qui est par ailleurs peintre et musicien, peut se vanter d’avoir une belle filmographie derrière lui. Wise Guys, Midnight Run, Bad Boys, etc. Autant de films auxquels il a participé… en tant que scénariste ! Niveau réalisation, l’homme est également loin d’être un débutant. The Comeback Trail est son dixième film, son premier long métrage, Trapped in Paradise date de 1994. Mais aucune de ses réalisations (29th Street, My Mom’s New Boyfriend, Middle Men, Columbus Circle ou encore The Poison Rose), n’a connu le succès de celles de Brian De Palma, Martin Brest ou Michael Bay. En regardant ce Comeback Trail, on comprend aisément pourquoi. Attention, le film est loin d’être un navet – les critiques grand-ducaux lui décernent d’ailleurs un 3/5 de moyenne –, mais avec un tel scénario et avec un trio de rêve : Robert De Niro, Tommy Lee Jones et Morgan Freeman (qui ont remporté, à eux trois, la bagatelle de quatre Oscars, trois Golden Globes, deux Cecil B. DeMille awards, deux prix d’interprétation à la Mostra de Venise, deux à San Sebastián, un à Cannes, un à la Berlinale, un Bafta, etc.) le spectateur pouvait s’attendre à quelque chose de consistant et virtuose frôlant le chef-d’œuvre ; il devra se contenter d’une comédie certes sympathique, mais sans plus.

L’histoire s’axe autour de Max Barber. Dans les années 70, il est, avec son neveu Walter, à la tête de Miracle Films, société de production cinématographique dont les ambitions artistiques n’ont jamais vraiment été rejointes par les possibilités financières. Leur dernier film, Killer Nuns attire enfin les foules devant les salles de cinéma. Mais pas pour aller voir le film, plutôt en signe de protestation.

Du coup, le vieux producteur filou se retrouve, encore une fois, endetté jusqu’au cou. Problème, cette fois-ci, c’est à Reggie Fontaine qu’il doit de l’argent. Le caïd de la mafia locale a beau être cinéphile et a beau comparer chacune de ses actions avec celle d’un personnage d’un film de l’âge d’or d’Hollywood, quand il est question d’argent, il n’a pas trop le sens de l’humour. Max ne dispose que de quelques jours pour le rembourser. Alors quand il apprend que son ancien assistant et désormais ennemi, James Moore, va toucher plusieurs millions de dollars suite au décès accidentel de la star de son dernier film, le vieil homme a une idée. Il va reprendre un scénario au hasard, proposer le premier rôle à une vieille star has-been et faire en sorte que celle-ci périsse dans un accident dès le premier jour de tournage pour toucher ainsi l’argent de l’assurance. C’est pour ça qu’il fera appel à Duke Montana, ancienne gloire du western fauché et alcoolique dont le seul but est désormais d’en finir avec la vie.

Bien évidemment rien ne se passera comme prévu et le vieux cow-boy parviendra, sans vraiment le vouloir, à se sortir de tous les pièges concoctés par le producteur. Des pièges qui donneront au tournage une force dramatique toute particulière qui finira par se ressentir sur les images immortalisées sur la pellicule. Et voilà que, ce qui était censé n’être qu’un film de série Z prétexte pour un tournage voué à s’arrêter au plus vite, finira par donner de grands moments de cinéma et bouleverser les projets de l’acteur, du producteur, mais aussi du mafieux.

On le répète, pas de quoi crier au génie ; le scénario est même plutôt téléphoné. Cela dit, on passe tout de même un bon moment en regardant ce Comeback Trail. C’est, certes, du cinéma vite consommé (et vite oublié ?), mais sur le moment on rigole bien. Le splastick fonctionne toujours, le côté papys grincheux des trois personnages principaux est réjouissant et dans les dialogues on dénombre un certain nombre de tirades bien trouvées. Et les deux scènes de casting : pour trouver le comédien et pour trouver le réalisateur du film – qui finira d’ailleurs par être une réalisatrice – sont assez jouissives.

On s’en contentera volontiers vue la pénurie actuelle de films dans le monde de la distribution cinématographique.

Pablo Chimienti
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