Bande dessinée

Largo au plus près des étoiles

d'Lëtzebuerger Land vom 24.11.2023

Le plus célèbres des milliardaires de papier, Largo Winch, donne de ses nouvelles dans Le Centile d’or, un 24e tome signé Philippe Francq et Eric Giacometti, qui conclut le diptyque débuté il y a deux ans avec La Frontière de la nuit. Haute finance et aventure extrêmes font toujours le quotidien du personnage inventé par Jean Van Hamme.

Il a parcouru le monde entier, il se devait de conquérir l’espace ! Voilà plus de trente ans que les aventures de Largo Winch, ancien orphelin aventurier propulsé à la tête d’un colossal empire financier, rythme la vie des bédéphiles amateurs de ce style franco-belge réaliste à mi-chemin entre business et thriller, haute finance et espionnage, milliardaires et meurtriers… Né comme personnage de roman de gare, en 1977, Largo Winch débarque dans le monde des phylactères en 1990 avec un premier tome intitulé L’Héritier. Son créateur est Jean Van Hamme, déjà bien connu en tant que scénariste de Thorgal et de XIII, ainsi que de nombreuses autres séries à succès, accompagné par Philippe Francq au dessin.

Largo est jeune, beau, intelligent et idéaliste. Orphelin yougoslave, il a été adopté par Nerio, un vieil homme d’affaires à la tête d’un groupe financier on ne peut plus opaque mais valant dix milliards de dollars. Pas pour en faire son fils, il n’y a jamais eu aucun affect entre eux, mais pour en faire son héritier. Une fois à la tête du Groupe W, Largo va essayer de garder ses idéaux intacts malgré la réalité des affaires, ce qui va lui valoir de grandes inimitiés dans les milieux financier ainsi que de nombreuses trahisons à l’intérieur même de sa structure. Avec sa garde rapprochée constituée d’anciens voleurs et autres parias repentis durs au mal mais au cœur tendre, il vit d’incroyables aventures qui les trimbalent partout dans le monde.

Cela donne plus de 400 millions d’albums vendus, que le duo Van Hamme- Francq va proposer dans une succession de diptyques – format idéal pour, au début du moins, adapter sans difficultés les romans – jusqu’en 2015. À la suite de la publication du vingtième tome, l’auteur originel passe la main à l’écrivain Eric Giacometti (Antoine Marcas). Le nouveau duo en charge a déjà publié un premier diptyque, puis un second composé de La Frontière de la nuit sorti en 2021 et donc de ce Centile d’or qui vient de paraître.

Dans la première partie, les lecteurs font la connaissance du couple Manskind. Beaux, jeunes et milliardaires, ils sont spécialisés dans les nouvelles technologies et l’aérospatial. Le mari, Jarod, surtout rêve d’espace, de Mars tout particulièrement. Pour réaliser son dernier rêve, il y besoin de Largo, il va donc entrer en contact avec lui à travers une connaissance commune, la belle Domenica Leona, sculptrice italienne et maîtresse de Largo que les lecteurs ont déjà croisés les tomes passés de la série.

Tout commence dans l’espace. À bord de l’Asteria, une navette spatiale créé et développée par Jarod, on retrouve les deux milliardaires. Et bien évidemment, ça commence mal. Les deux hommes ont perdu connaissance à cause d’un manque d’oxygène orchestré par un groupe d’activistes radicaux, « We blue », qui semble prêt à tout pour contrecarrer les projets des ultra-riches. Au point de leur lancer un dangereux « Professeur », expert en armes et explosifs, aux trousses.

Comme toujours dans une aventure de Largo Winch, les faux semblants, les trahisons, les surprises, les fusillades et les cadavres se succèdent à grande vitesse. Du Sud de la France, à l’Indonésie, en passant par Londres, la Californie, New York, Kourou ou encore l’espace – c’est clair que c’est n’est pas l’idéal au niveau du bilan carbone ! – on suit la fin de cette aventure pleine de rebondissement dont tous les protagonistes ne sortiront pas indemnes. Il y est question d’argent, bien sûr, de comment en gagner toujours plus, mais aussi et surtout de pollution, de surexploitation des ressources, d’esclavage moderne…

Les thématiques ne sont peut-être plus tout à fait les mêmes qu’au début des années 90, Largo évoluant avec son temps, mais les sujets profonds, eux, restent bien les mêmes. Tout comme Largo, qui se refuse à vieillir, la série n’a finalement pas pris une ride. Le changement de scénariste est finalement assez peu visible au niveau des récits ; d’autant plus que le dessinateur, lui, est resté le même depuis les débuts, ce qui place l’ensemble dans une claire continuité graphique.

Du coup, en tant que lecteur, bien que l’arc narratif des diptyques soit désormais connu et reconnu, on ne cesse de se laisser impressionner par la virtuosité du duo Francq-Giacometti qui arrive encore et toujours à nous en mettre plein les yeux et plein la tête.

Largo Winch - t 24 – Le Centile d’or, de Philippe Francq et Eric Giacometti. Dupuis

Pablo Chimienti
© 2024 d’Lëtzebuerger Land